PAR UN MATIN D'AUTOMNE de Robert Goddart****

Leonora Galloway est de celles qui ont une grande histoire familiale. Un jour, elle emmène sa fille en France à Thiepval, au musée Franco Britannique pour lui dévoiler ses origines. A commencer par répondre à la question suivante : pourquoi la mort de son père (dont le nom figure sur le mémorial) remonte à plus d'un an avant sa naissance ? C'est un long voyage dans le temps lors de la première guerre mondiale qui débute allant de révélation en révélation.

Les romans de Robert Goddart sont très célèbres dans son pays d'origine, la Grande Bretagne. Par un matin d'Automne, face à son immense succès, est l'un des seuls traduit dans la langue française. Le public l'a d'ailleurs acclamé en lui décernant des prix tels que le Prix des lecteurs 2011.

Un puzzle passionant. Magnifique voyage temporel que nous offre là Robert Goddart dans ce beau roman  ! Partagé entre faits historiques et romancés, le livre fait plonger le lecteur au cœur d’une grande histoire familiale pleine de rebondissements.

Histoire d’amour, prestige familial, querelles, non-dits, secrets, meurtres, disparitions… Tous les ingrédients d’une intrigue solide nous tiennent en haleine jusqu’à la dernière page. Notre envie de connaître la vérité est grandissante et aussi forte que celle de Leonora, à la recherche de son passé. Un passé destructeur mais qui l’a trop longtemps empêchée de vivre pleinement.

Derrière cette jeune femme que l’on peut croire effacée, on sent cette grande force, cette conviction, cette puissance qui la fait petit à petit avancer vers le bonheur. Savoir qui l’on est, savoir d’où l’on vient, effacer tous les points d’interrogation qui subsistent dans sa vie… Une quête nécessaire au bien-être.

On est également marqué par la force de caractère des (nombreux) autres personnages. Lady Powerstock, la vilaine, perverse, prête à tout pour son propre confort. Cheriton, le sensible qui finira par craquer. Mlle Fotheringham, la douce amie dévouée. Franklin, le valeureux soldat…Chacun marque ce roman de sa propre empreinte.

Si je devais émettre ne serait-ce qu’une petite réserve, je dirais qu’à trop vouloir cacher des secrets et rendre la quête difficile, l’auteur est peut-être allé trop loin vers la fin.Le sprint final vers la vérité n’est-il pas trop alambiqué ? Les personnages censés détenir le petit bout restant du puzzle ne cessent de se renvoyer la balle. Quoiqu’il en soit, on se délecte de ce bijou jusqu’au dernier mot !

Un extrait : "Du point de vue de Penelope, les arguments en faveur de cette escapade ne manquent pas. Sa mère a toujours réussi, au prix d'une surveillance constante, à éviter de parler d'elle même et à ne laisser échapper de son passé que des récits évasifs. La curiosité de Penelope envers cette femme distante n'a cessé de grandir. D'instinct, elle pressent que ce voyage apportera des réponses à certaines questions jamais éclaircies. Déjà, l'escale à Amiens était inattendue. Ici, elle en est convaincue, commencent les explications.

-J'imagine que tu te demandes pourquoi nous sommes venues à Thiepval, dit Leonora.

-En effet. Mais je suis certaine que tu me l'expliqueras quand tu en auras envie.

Elle se souvient que son père, un homme patient et de bon conseil, lui a dit il y a longtemps "Ta mère se confiera à toi lorsqu'elle l'aura décidé, et non au moment où toi, tu le voudrais."

La brume s'est atténuée et les lignes du bâtiment de brique, symbole de deuil officiel, deviennent plus précises tandis que l'horizon vire du gris uniforme au vert et au bleu. Les visiteuses se sentent impressionnées, un peu écrasées par l'édifice  immense et sans grâce malgré ses sculptures.

- Le soleil ne tardera pas à se montrer, dit Leonora. Nous allons pouvoir commencer à chercher son nom.

- Le nom de qui ?

- De mon père. C'est pour cela que nous sommes venues."

Aux éditions Le livre de poche
Première parution en 1988 aux éditions Goddard & Goddard
542 pages
ISBN 978 2  253 15836 3